Par un arrêt du 13 octobre 2016 (n° 402318), le Conseil d’Etat a refusé de transmettre la QPC déposée à l’appui d’un recours pour excès de pouvoir contre le paragraphe 380 de l’Instruction BOI-PAT-ISF-30-20-30 en tant qu’il reprend les dispositions du IV de l’article 1736 du CGI instaurant une amende de 12,5 % de la valeur des biens ou  droits et produits placés dans un trust lorsque les administrateurs du trust n’ont pas respecté leurs obligations déclaratives.

Pourtant, si le Rapporteur public avait bien conclu au rejet de la requête pour des motifs sur lesquels nous reviendrons, il a également indiqué que sur le fond, il aurait recommandé la transmission de la QPC.

Alors, pourquoi ce rejet ? Tout simplement parce que deux avocats qui se reconnaîtront ont trouvé malin de contourner le fait qu’ils n’avaient pas de client en cours de régularisation bénéficiaire d’un trust dont les administrateurs n’avaient pas respecté leurs obligations déclaratives en créant une fantomatique Association des Contribuables Repentis qui a déposé le recours. Manque de chance pour eux, la jurisprudence sur l’intérêt à agir des associations n’est pas aussi souple qu’ils l’espéraient.

Le résultat, c’est que les contribuables qui sont bénéficiaires de trusts et qui régularisent spontanément leur situation continuent à subir des amendes dont on a tout lieu de penser qu’elles sont anticonstitutionnelles

Et le pire, c’est que pour tenter de combler le « trou » créé par la décision du Conseil Constitutionnel sur les amendes pour compte étranger non déclaré, le STDR applique aujourd’hui l’amende « trust » aux structures interposées, quand bien même ces dernières ne sont pas des trusts mais des fiducies ou des sociétés offshore (panaméennes, BVI ou autres). C’est illégal, mais à qui se plaindre ? Les contribuables repentis ont le sentiment d’avoir le pistolet sur la tempe car s’ils ne signent pas dans les 30 jours la transaction qui leur est proposée, ils perdent les atténuations des autres pénalités prévues par la Circulaire Cazeneuve et, surtout, la protection contre les poursuites pénales pour fraude fiscale.

Notre cabinet n’a pas de client concerné par l’amende « trust », mais il en a beaucoup qui possèdent des structures interposées. Afin de mettre fin à l’application de cette amende dans les plus brefs délais, nous allons pour le compte de l’un d’entre eux déposer un recours pour excès de pouvoir avec QPC contre cette amende. L’intérêt du client à agir reposera sur la pratique nouvelle du STDR d’appliquer l’amende « trust » hors de son champ normal d’application (les seuls trusts).

Si notre recours est rejeté par le Conseil d’Etat, cette décision aura au moins pour mérite de démontrer que les amendes « trust » ne sont pas dues en cas de structures interposées, ce qui permettra à notre client et à tous les contribuables repentis concernés de s’opposer à leur application.  En effet, le STDR étant censé appliquer la loi, toute la loi mais rien que la loi, il ne pourra plus leur infliger une amende dont le Conseil d’Etat aura jugé qu’elle n’était pas due.

Et si notre QPC est transmise au Conseil Constitutionnel, nous avons bon espoir que ce dernier réserve à l’amende « trust » le même sort qu’à l’amende pour non-déclaration des comptes étrangers compte non seulement tenu de son caractère proportionnel, mais également de son assiette qui, incluant la totalité des avoirs du trust situés tant en France qu’à l’étranger dès lors qu’un seul bénéficiaire réside en France, peut difficilement être considérée comme proportionnée au manquement qu’elle réprime.