Par une décision très attendue du 9 décembre 2016 (n° 2016-603 QPC), le Conseil Constitutionnel a mis fin aux espoirs des contribuables qui, ayant fait une donation à une époque où le rappel fiscal n’était que de 10 ou 6 ans, contestaient que le délai de 15 ans fixé par la loi de finances rectificative pour 2012 (loi n° 2012-958 du 16 août 2012) leur fut applicable.

Le Conseil écarte assez sèchement leur argumentaire relatif à la garantie des droits (article 16 de la DDH) en considérant de manière assez peu surprenante que cette garantie ne saurait obliger le législateur à prévoir des mesures de transition lorsqu’il modifie un délai fiscal.

Le Conseil fait toutefois une réserve d’interprétation pour préciser que le législateur ne peut pour autant appliquer des règles d’assiette ou de liquidation autres que celles qui étaient applicables à la date de chaque fait générateur d’imposition.

Cette réserve vise à prévenir le législateur que si modification il y a, elle ne saurait être rétroactive. Elle ne sera cependant pas d’un grand secours aux contribuables concernés puisque la mesure est entrée en vigueur lors de la publication de la loi. Il s’agit donc plutôt d’une mise en garde que la garantie des droits pourrait faire échec à la « mini-rétroactivité » consistant à faire rétroagir la mesure à une date antérieure, comme celles de la présentation du projet de loi ou du vote de l’amendement introduisant la mesure.

Sur ce point, on sait la jurisprudence du Conseil contrastée (voir par exemple la décision 2015-475 QPC du 17 juillet 2015 par laquelle le Conseil a validé une loi rétroagissant à l’adoption de l’amendement l’instaurant). Faut-il y voir une évolution ou une simple précision applicable seulement en matière de droits de mutation à titre gratuit ? Même si nous penchons plutôt en faveur de la seconde branche de l’alternative (mais les commentaires de la décision – non encore publiés à cette heure – nous en apprendront peut-être plus), nous estimons que la question méritera d’être posée chaque fois que possible, en espérant que les juridictions qui filtrent les QPC joueront le jeu en transmettant les questions posées dont elles seront saisies.

Pour notre part, nous déposerons prochainement une QPC pour faire juger que la rétroactivité au 3 mars 2011 de l’exit tax viole la garantie des droits pour les contribuables qui ont transférés leur domicile fiscal hors de France avant le 14 mai 2011, date de présentation du projet de loi de finances rectificative pour 2011. En effet, nous sommes en mesure d’établir que rien dans le discours prononcé par le ministre des finances ce jour-là n’informait les contribuables de l’introduction immédiate de l’exit tax.