Le 15 septembre 2017 se tenait l’audience devant le Conseil d’Etat de notre recours pour excès de pouvoir contre le régime fiscal des trusts.

Rappelons que nous contestions la conformité à notre Constitution de l’article 885 G ter du CGI, qui prévoit que les biens ou droits placés dans un trust ainsi que les produits qui y sont capitalisés sont compris, pour leur valeur vénale nette au 1er janvier de l’année d’imposition, selon le cas, dans le patrimoine du constituant ou dans celui du bénéficiaire réputé constituant, ainsi que de l’article 990 J du CGI, qui institue un prélèvement de 1,5 % à la charge du constituant ou bénéficiaire d’un trust assis sur la valeur des actifs de ce trust sauf s’ils ont été inclus dans le patrimoine déclaré à l’ISF du constituant ou d’un bénéficiaire ou déclarés en application de l’article 1649 AB dans le patrimoine d’un constituant ou bénéficiaire réputé être un constituant. Le même article 990 J prévoit qu’en cas de défaut de versement de ce prélèvement par l’administrateur du trust, le constituant, le bénéficiaire ou leurs héritiers sont solidairement responsables du paiement à l’exception de ceux qui ont régulièrement souscrit leurs déclarations d’ISF ou n’y sont pas assujettis.

Concernant l’article 885 G ter, le Rapporteur Public Benoît Bonhert a relevé que le dispositif mis en œuvre par le législateur de 2011 écartait tout moyen de contestation lié au contenu de l’acte de trust et avait pour objet de s’appliquer dans tous les cas, que les trusts soient révocables ou irrévocables, simples ou discrétionnaires. Il a considéré que les hésitations qui transparaissent dans les travaux préparatoires liées au caractère malgré tout quelque peu arbitraire de cette règle de rattachement lui paraissaient à elles seules de nature à justifier que cette question délicate soit portée devant le juge constitutionnel.

S’agissant de l’article 990 J, il a estimé que les débats parlementaires démontraient clairement que le législateur n’avait pas entendu permettre le cumul du prélèvement sui generis avec l’ISF, de sorte qu’il n’y avait pas lieu de transmettre notre QPC. Toutefois, il a reconnu que le texte légal comme la doctrine administrative attaquée étaient ambigus et que dans le cadre de l’examen du recours pour excès de pouvoir, il sera nécessaire que le Conseil d’Etat clarifie ce point.

Il a en revanche considéré que nos griefs tirés d’une violation de la vie privée permise par la solidarité de paiement entre le trustee, le constituant et le bénéficiaire n’étaient pas sérieux dès lors que contrairement au registre public des trusts, la diffusion de l’information ne concernait qu’un nombre très restreint de personnes.

Nous pensions pourtant avoir été clairs dans nos écritures : ce n’est pas le nombre de personnes informées de l’existence du trust qui pose problème, mais leur qualité. Monsieur Tartampion se moque éperdument que votre serviteur sache qu’il a désigné Madame Duchmol comme bénéficiaire de son trust. Ce qu’il ne veut en revanche pas, c’est que Madame Duchmol soit informée de sa qualité de bénéficiaire. Car divulguer cette information équivaut à divulguer son testament, ce qui pourrait susciter des pressions à son encontre. Tout cela a été très bien expliqué par le Conseil Constitutionnel lorsqu’il a sanctionné le registre public des trusts.

Nous verrons dans une quinzaine de jours le sens de la décision que rendra le Conseil d’Etat. Mais même si ce dernier suit son Rapporteur Public et ne transmet que notre QPC concernant l’article 885 G ter, ce sera déjà une grande victoire.