(CAA Paris, 9° ch., 11 octobre 2024, n° 22PA03139)

Nous nous sommes récemment émus (Fiscalité des trusts : la CAA Paris exige toujours plus de justificatifs – Blog du Cabinet Bornhauser avocats) de la portée d’une décision rendue par la Cour Administrative d’Appel de Paris sur la fiscalisation d’une distribution d’actifs trustaux. La lecture des conclusions du rapporteur public nous conduit à nuancer notre propos.

En effet, ces conclusions nous amènent à revoir l’interprétation que nous avions faite de la phrase suivante : « elle n’établit pas, notamment par la production de la comptabilité tenue par les administrateurs du trust, que ces flux correspondraient, soit, s’agissant des années 2009 et 2010, à une redistribution de produits du trust, eux-mêmes déjà soumis à l’impôt sur le revenu, soit, pour l’ensemble des années en litige, à une opération en capital au profit du trust, relevant du champ d’application des droits de mutation, dont elle aurait été bénéficiaire ». Nous avions interprété cette phrase comme signifiant que la Cour avait refusé d’accepter comme mode de preuve la comptabilité du trust. Or, les conclusions nous informent que cette comptabilité n’a pas été produite par la contribuable.

Dès lors, la décision ne s’inscrit nullement en opposition de celle rendue l’année dernière par la 5ème chambre de la même Cour, mais plutôt dans son prolongement, avec toutefois un apport de taille : sauf à édicter le principe que toute distribution serait présumée porter sur du capital, à charge pour l’administration de prouver le caractère imposable des sommes perçues, elle considère que l’article 120, 9° du CGI fixe, implicitement mais nécessairement, une présomption d’imposition à laquelle le contribuable peut faire échec en apportant – le cas échéant par la comptabilité du trust – la preuve de leur caractère non imposable. Et l’on ne peut qu’être d’accord avec le rapporteur public quand il estime qu’il n’apparaît pas déraisonnable de raisonner ainsi, faute de quoi l’administration aurait les plus grandes difficultés à taxer les sommes distribuées par un trust alors même que ces distributions portent le plus souvent sur des revenus du trust.

La lecture de ces conclusions – dont nous espérons qu’elles seront publiées – démontrent également que le rapporteur public avait, avant de les rédiger, pris connaissance de l’article que nous avions publié dans la revue Droit Fiscal (n° 38/24, Fiscalité du Trust : Entre Transparence et Opacité). Nous avons ainsi eu la satisfaction d’y voir reprises plusieurs de nos thèses, en particulier celle relative à la nécessité d’un correctif de type Quemener pour éviter la double imposition d’un contribuable ayant été soumis aux droits de mutation à titre gratuit sur les actifs du trust qui percevrait ensuite une distribution desdits actifs, mais aussi celle afférente à l’absence de prise en compte des trusts dans les entités concernées par la présomption de distribution de l’article 111 du CGI.

Nous espérons qu’à la lecture de ce billet, les magistrats de la 9ème chambre de la Cour nous pardonneront la véhémence de nos propos initiaux, que nous n’aurions en tout état de cause pas tenus si la rédaction qui nous a induit en erreur avait été plus limpide…