Le Conseil d’Etat prolonge l’agonie de la PUMA
On se souvient qu’un recours pour excès de pouvoir avait été déposé contre la Circulaire commentant l’instauration de la Contribution Maladie Subsidiaire « PUMA » et que la QPC jointe au recours avait donné lieu à une décision du Conseil Constitutionnel ayant jugé conforme la contribution au motif qu’il s’agissait d’une cotisation sociale et non d’un impôt, mais ayant assorti sa décision d’une importante réserve d’interprétation (https://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2018/09/27/la-puma-mortellement-blessee/).
Dans cette réserve, le juge constitutionnel disait que… « il appartient au pouvoir règlementaire de fixer ce taux et ces modalités d’application de façon à ce que la cotisation n’entraîne pas une rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques ».
Par une décision n° 417919 du 10 juillet 2019, le Conseil d’Etat vient de rejeter le recours pour excès de pouvoir dont il était saisi. Après avoir donné à la réserve d’interprétation du Conseil Constitutionnel le baiser de Judas en rappelant sa portée absolue, il a considéré que les modalités de calcul de la cotisation maladie subsidiaire 2016, bien que non plafonnée, n’entraînaient pas une telle rupture.
Cette décision est non seulement décevante pour tous les assujettis à cette contribution, mais elle est surtout parfaitement critiquable en droit, en ce qu’elle vide de toute portée la réserve d’interprétation dont le législateur, lui, a parfaitement saisi le sens puisqu’il a modifié, certes seulement à compter de 2018, le mode de calcul de la PUMA en introduisant un dispositif de plafonnement (https://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2018/11/12/reforme-de-la-puma-le-senat-devoile-le-pot-aux-roses/).
En effet, il convient de rappeler que le Conseil Constitutionnel n’avait aucunement besoin de prononcer cette réserve puisqu’il validait la PUMA au motif qu’elle constituait une contribution sociale relevant du pouvoir règlementaire et donc échappant à son contrôle de constitutionnalité des lois. S’il a pris le soin de l’édicter, c’est bien pour enjoindre au pouvoir règlementaire de mettre le texte en conformité avec le principe constitutionnel d’égalité devant les charges publiques. Ne pas censurer la première version non plafonnée de la PUMA, c’est tout simplement refuser de tenir compte de la réserve d’interprétation.
Nous nous trouvons donc devant un cas de figure tout à fait particulier où le juge suprême administratif a rendu une décision que le juge judiciaire attendait certes avec impatience, mais qui ne le lie pas pour autant puisque le Conseil d’Etat n’était pas saisi d’une Question Préjudicielle mais d’un recours parallèle.
Nous allons donc continuer à défendre, outre nos arguments de procédure qui ont déjà fait mouche (https://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2019/05/23/le-tgi-de-lille-annule-les-cotisations-puma/), l’inconstitutionnalité de la PUMA non plafonnée version 2016 et 2017, en espérant que le juge judiciaire aura un avis plus respectueux de la réserve d’interprétation du Conseil Constitutionnel.
Ce contentieux riche en rebondissements est décidément passionnant !