Rétroactivité de la hausse de la CSG sur les plus-values mobilières : le Rapporteur public conclut au rejet de notre QPC
Sur la question complexe de l’application de la loi fiscale dans le temps, nous pensions nous être forgé, à la lecture attentive de la jurisprudence, quelques idées simples : le législateur ne peut porter atteinte à des situations légalement acquises, sauf motif d’intérêt général qu’il doit expliciter. En matière d’impôt sur le revenu et d’impôt sur les sociétés, il faut attendre le douzième coup de minuit, le 31 Décembre, pour disposer d’une telle situation. Mais quand on réalise une plus-value, c’est à la date de l’acte qu’il faut se placer.
Pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? A l’audience du Conseil d’Etat du 5 Septembre 2019, Mme Cortot-Boucher, Rapporteur public chargé d’apprécier le mérite de notre QPC relative à l’augmentation rétroactive de la CSG sur les plus-values- mobilières 2017, a démoli ce que nous pensions avoir compris. Mme Cortot-Boucher invite la Haute Assemblée à établir une « distinction subtile » entre le fait générateur de la plus-value et le fait générateur de l’imposition de la plus-value. Selon elle, la jurisprudence antérieure a été bâtie pour déterminer l’année du fait générateur de l’imposition et non celui du régime fiscal y afférent.
Dans un arrêt du 10 février 2017 (n° 386221, Guevenoux-Glorian), le Conseil d’Etat avait jugé qu’il convient de se placer… « à la date du fait générateur de cette plus-value, c’est-à-dire à la date à laquelle est intervenue la cession, et non pas au 31 décembre de l’année d’imposition, date du fait générateur de l’impôt sur le revenu ». Mais selon Mme Cortot-Boucher, cette décision, rendue spécifiquement à propos de l’application de l’article L80 A du LPF, ne peut être étendue. C’est le contraire de ce qu’indiquait à l’époque – en 2017, c’est-à-dire hier – le Rapporteur public de cette affaire, Madame Nicolazzo de Barmon, qui estimait qu’il ne s’agissait-là que d’un principe général applicable à toute la matière des plus-values.
Si le Conseil d’Etat suit la recommandation de Mme Cortot-Boucher, les professionnels du Droit vont avoir intérêt à annuler leurs prochains réveillons : car ce n’est qu’à l’instant fatidique et fugace du 12ème coup qu’ils pourront assurer à leurs clients qui auront réalisé des plus-values de cession de valeurs mobilières et de droits sociaux : « Vous bénéficiez enfin d’une situation légalement acquise. Vous pouvez sabler le Champagne ».