(Tribunal Fédéral, 30 octobre 2024, n° 9C_176/2024 : https://lnkd.in/ex5824zc)

Ce qui est fascinant avec la fiscalité internationale, c’est de constater que sur les sujets transverses, les États étrangers sont souvent confrontés aux mêmes problématiques que la France et que leurs manières de les résoudre, par delà les différences de leurs systèmes juridiques, sont finalement assez voisines.

Le trust étant le sujet transverse par excellence, nous avons accueilli avec satisfaction la décision rendue par le Tribunal Fédéral sur un sujet que nous connaissons bien : la question de la double imposition des avoirs mis en trust aux droits de succession et à l’impôt sur le revenu.

Le cas de figure était assez classique : une petite-nièce avait reçu, en qualité de bénéficiaire d’une fondation panaméenne, des droits sur les actifs de la fondation au décès de sa grande-tante. La succession avait acquitté les droits de mutation à titre gratuit (DMTG) sur les avoirs de la fondation, puis celle-ci avait quelques temps plus tard versé à l’héritière sa quote-part dans ses actifs, laquelle correspondait au montant soumis aux DMTG majoré des intérêts capitalisés depuis.

L’administration genevoise ayant réclamé l’impôt sur le revenu à raison de la totalité des sommes distribuées alors que l’héritière n’avait pour sa part déclaré que les intérêts capitalisés, le litige aboutit au tribunal fédéral après que la cour d’appel avait infirmé le jugement de première instance lui accordant le dégrèvement demandé.

Contrairement au droit français, le code des impôts suisse contient une disposition expresse interdisant de soumettre à l’impôt sur le revenu des sommes qui ont déjà subi les droits de mutation à titre gratuit (article 24 LFID). Pour s’assurer que ce texte soit bien appliqué, la jurisprudence interdit « le dualisme de méthodes », qui consiste à qualifier une somme d’une certaine manière pour l’application d’un impôt et d’une autre manière pour l’application de l’autre impôt. Et c’est exactement cela qu’avait fait l’administration genevoise, en considérant que les avoirs de la fondation était passibles des DMTG à raison du droit économique qu’avait la bénéficiaire dessus, puis que les sommes versées par la fondation étaient passibles de l’impôt sur le revenu dès lors qu’il s’agissait d’une distribution juridique.

Force est donc resté au bon sens grâce à l’interdiction du dualisme de méthodes là où le droit français se fonde sur le principe d’égalité devant les charges publiques. Mais le plus fascinant dans cette affaire helvétique est tout de même qu’elle arrive dans le même espace de temps que les décisions rendues par la jurisprudence française. La preuve que l’institution du trust est mine de rien en train de se démystifier.