QPC sur les compléments de prix : le Conseil Constitutionnel donne gain de cause au contribuable
Nous vous avions informé de l’existence d’une QPC pendante par laquelle nos confrères et amis Eve Obadia et Louis-Marie Bourgeois, qui président la Commission Fiscale de l’Ordre du Barreau de Paris, avaient demandé au Conseil d’Etat, qui en avait saisi le Conseil Constitutionnel, de déclarer contraire à la Constitution la loi sur les plus-values qui, selon l’interprétation qu’en donnait l’administration, réservait l’abattement pour durée de détention aux seules plus-values réalisées à compter du 1er janvier 2013.
Par une décision n° 2015-515 QPC du 14 janvier 2016, le Conseil d’Etat a déclaré la loi conforme à la Constitution sous la réserve d’interprétation suivante (Considérant n° 12) : « Considérant, toutefois, que les dispositions contestées ne sauraient, sans créer de rupture caractérisée de l’égalité devant les charges publiques, avoir pour effet de faire obstacle à l’application de l’abattement pour durée de détention lorsque, à la date de la cession des titres, la condition de durée de détention était satisfaite, soit que cette cession a été réalisée avant le 1er janvier 2013, soit qu’elle n’a pas dégagé de plus-value ».
En d’autres termes, le Conseil Constitutionnel a rejeté leur recours au motif que leur interprétation était la bonne : il n’y avait aucune raison que l’administration refuse aux compléments de prix perçus postérieurement à 2013 au titre de cessions de titres de sociétés intervenues avant cette date l’abattement pour durée de détention auxquels les contribuables avaient droit compte tenu de la durée de détention des titres cédés acquise lors de leur vente.
Nous adressons à nouveau (car nous l’avons déjà fait de vive voix lors des vœux de l’IACF dont ils sont membres) nos plus sincères félicitations à Eve et Louis-Marie pour ce brillant succès.
Ceci étant dit, nous déduisons de cette décision que l’interprétation retenue par l’administration dans son projet d’instruction relative à l’article 150-0B ter du CGI, qui considère que seule la plus-value réalisée à compter du 1er janvier 2013 peut bénéficier de l’abattement pour durée de détention prévue par l’article 150-0D du CGI (BOI-RPPM-PVBMI-20-20-10, n° 130), se trouve infirmée : les plus-values d’apport réalisées entre le 14 novembre et le 31 décembre 2012 doivent également bénéficier de cet abattement alors même que la loi l’ayant introduit dans notre droit n’était pas en vigueur à cette date.
Par identité de motifs, il devrait en être selon nous de même pour les plus-values en report constatées avant le 1er janvier 2000 sous l’empire des dispositions des articles 92 B et 150 I ter du CGI. Cette position nous paraît donc condamner celle retenue par le Conseil d’Etat le 12 novembre 2015 (n° 390265) sur le Recours pour Excès de Pouvoir que nous avions introduit pour le compte de l’un de nos clients, qui a nous a donné tort tout en refusant de transmettre la QPC que nous avions déposée pour saisir le Conseil Constitutionnel de la position restrictive de l’administration, qui refuse d’appliquer l’abattement pour durée de détention à ces plus-values en report qui, compte tenu de leur ancienneté, sont toutes éligibles à l’abattement de 65 %.
Pour cette raison et parce que nous ne pouvons nous résoudre à ce que nos clients concernés subissent une fiscalité pouvant aller jusqu’à 64,5 % (compte tenu de la Contribution Exceptionnelle sur les Hauts Revenus) de leurs plus-values en report constatées avant le 1er janvier 2013, nous allons de nouveau solliciter l’annulation de l’Instruction administrative commentant le régime des plus-values en invoquant ce changement de circonstances.. Nous espérons que cette fois, le Conseil d’Etat nous donnera gain de cause sans même transmettre notre QPC au Conseil Constitutionnel.
Comme l’écrivait Victor Hugo : « L’espoir changea de camp, le combat changea d’âme ».