QPC sur le plafonnement de l’ISF : le Rapporteur public propose sa non-transmission
Résumé : Notre QPC sur le mode de calcul du plafonnement de l’ISF en fonction du revenu, qui prévoit la prise en compte des plus-values immobilières pour leur montant brut sans tenir compte de l’inflation, sera très probablement rejetée au motif que cette règle a déjà été déclarée conforme à la Constitution. Nonobstant, le Conseil Constitutionnel devrait se prononcer d’ici la fin de l’année sur le plafonnement de l’IFI qui est rédigé en des termes identiques. Une réserve d’interprétation exigeant la prise en compte de l’inflation nous permettrait d’obtenir gain de cause.
On se souvient ( http://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2017/09/01/plus-values-exonerees-et-plafonnement-isf-une-nouvelle-qpc-en-preparation/ )que nous avions déposé un recours pour excès de pouvoir assorti d’une QPC contre le mode de calcul du plafonnement de l’ISF, qui prend en compte les plus-values immobilières pour leur montant brut sans abattement pour durée de détention ni coefficient d’érosion monétaire.
Cette QPC se heurtait au fait que dans sa décision 2012-662 DC du 29 décembre 2012, le Conseil Constitutionnel avait validé dans son ensemble l’article 885 V bis du CGI. Nous avons tenté de contourner cet écueil en soutenant que par plusieurs décisions intervenues postérieurement, le Conseil a considéré que le principe de l’égalité devant les charges publiques (article 13 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789) nécessitait à tout le moins, en l’absence de tout autre mécanisme correcteur du prix du temps du type abattement pour durée de détention, de prévoir de tenir compte de l’inflation par le biais d’un coefficient d’érosion monétaire.
Nous n’avons hélas pas réussi à convaincre le Rapporteur public de la 8ème chambre du Conseil d’Etat, qui a estimé que les précisions apportées par la jurisprudence que nous citions ne constituait pas un changement de norme de constitutionnalité au sens de la décision 2009-595 DC fixant la jurisprudence en la matière. Il a illustré son propos en citant la décision 2010-104 QPC du 17 mars 2011 par laquelle le Conseil constitutionnel a reconnu que s’il avait précisé, postérieurement à une première décision de 1999 déclarant une disposition conforme à la Constitution, que le principe d’individualisation des peines découlait de l’article 8 de la Déclaration, cette précision ne constituait pas un changement de circonstances de nature à imposer un réexamen.
Si le Rapport public, comme c’est probable, est suivi par le Conseil d’Etat, notre affaire n’en sera pas terminée pour autant. En effet, nous croyons savoir que la question de la constitutionnalité de plusieurs dispositions de l’Impôt sur la Fortune Immobilière va être posée au Conseil Constitutionnel par les sénateurs de l’Opposition et que parmi les mesures contestées figurera le mode de calcul du plafonnement de l’impôt.
D’ici la fin de l’année, le Conseil va donc très probablement devoir se prononcer sur ce point et nous espérons vivement qu’il considèrera la question différemment compte tenu de l’évolution de sa jurisprudence sur les facultés contributives.
S’il assortit la validation du texte d’une réserve d’interprétation rendant nécessaire la prise en compte de l’inflation, le Conseil d’Etat devra en tenir compte lorsqu’il statuera sur notre Recours pour Excès de Pouvoir et, faute pour l’instruction contestée de prévoir l’application d’un coefficient d’érosion monétaire, il devra l’annuler. Et donc nous donner satisfaction nonobstant le rejet de notre QPC.