Dans la torpeur de l’été et avant la pause estivale, le Conseil d’Etat a transmis au Conseil Constitutionnel deux Questions Prioritaires de Constitutionnalité dans le domaine de la fiscalité.

La première (28 juillet 2017, n° 410452) ne nous retiendra que peu : enfin saisi par notre confrère Violaine Dieudonné d’un recours pour excès de pouvoir contre l’instruction commentant le régime de l’amende pour non-déclaration des contrats d’assurance-vie souscrits hors de France (BOI-CF-INF-20-10-50) issu de la loi de finances rectificative du 14 mars 2012, le Conseil d’Etat a fort logiquement décidé de transmettre la question de savoir si l’amende proportionnelle de 5 % réprimant le défaut de déclaration était ou non conforme à la Constitution.

De notre point de vue, cette question n’avait plus lieu d’être posée puisque la loi de finances rectificative pour 2016 ayant abrogé cette amende, les contribuables concernés pouvaient, ainsi que l’administration le reconnaissait d’ailleurs dans ses commentaires (BOI-CF-INF-20-10-50, n° 130, 8 mars 2017), bénéficier de la rétroactivité in mitius, donc de l’application immédiate de la loi pénale plus douce aux pénalités non encore établies ou pour lesquelles les délais de recours n’étaient pas expirés.

Il semble toutefois que certains STDR aient eu du mal à appliquer ces principes et aient continué à réclamer l’amende proportionnelle lors de l’émission des transactions. La position que prendra le Conseil Constitutionnel ne soulevant que peu de suspense, ces pratiques délétères devraient cesser dans les trois mois qui viennent. Dans l’immédiat, les contribuables concernés auraient intérêt à n’accepter les transactions proposées qu’avec réserves en ce qui concerne les amendes pour les contrats d’assurance-vie. Et à ne pas hésiter à faire remonter leur dossier auprès de la DNVSF, qui est chargée de l’exécution de la Circulaire « Cazeneuve », voire de la sous-direction chargée du contrôle fiscal qui la chapeaute.

La seconde QPC (28 juillet 2017, n° 411546) concerne un problème récurent du transfert du domicile fiscal hors de France des personnes physiques. Lorsque le contribuable est propriétaire de sa résidence principale et la met en vente à l’occasion de son départ à l’étranger, l’administration considère qu’il ne bénéficiera de l’exonération de la plus-value réalisée que s’il est encore résident fiscal français à la date de la vente (BOI-RFPI-PVINR-10-20, N° 200, 6 juillet 2016). Elle lui refuse donc la mesure de faveur qu’elle accorde aux résidents français consistant à exonérer les plus-values réalisées dans des « délais normaux de vente » (en principe, un an).

Cette position, qui semble d’ailleurs avoir déjà été implicitement sanctionnée par la Cour Administrative d’Appel de Paris (2 février 2016, n° 15PA01016), ne nous paraît toutefois guère compatible avec les libertés communautaires . En effet, elle conduit à discriminer les contribuables selon qu’ils transfèrent leur domicile fiscal en France ou dans un autre État membre de l’Union Européenne (et de l’Espace Économique Européen et en Suisse), violant ainsi la liberté de circulation des travailleurs.

Mais cette position, qui n’a à notre connaissance pas encore reçu d’écho en jurisprudence, laissait en tout état de cause de côté les contribuables qui, transférant leur domicile dans un État tiers, ne pouvaient se prévaloir d’une liberté communautaire.

La question posée au Conseil Constitutionnel est de savoir si cette discrimination entre les contribuables résidents et non-résidents est ou non contraire au principe d’égalité devant la loi. Nous attendrons sa réponse avec intérêt car en l’état actuel de sa jurisprudence, il nous paraît bien difficile de prévoir le sens de sa décision. En faveur d’une réponse positive, nous avouons avoir du mal à trouver une quelconque justification à cette différence de traitement. A l’appui d’une réponse négative, nous pouvons citer sa récente décision qui a refusé d’étendre le champ de la jurisprudence « Metro Holding » sur la discrimnation à rebours aux résidents des Etats tiers (n° 2016-615 QPC du 11 mars 2017).

Quoi qu’il en soit, cette décision est attendue par les professionnels avec impatience. Actuellement, nous sommes contraints de recommander à nos clients d’attendre d’avoir vendu leur résidence principale avant de déménager, ce qu’il font donc en général le jour-même de la signature de l’acte authentique. Et ceux qui sont mal conseillés se font tout simplement avoir…