Nous vous l’annoncions dès la fin de l’année dernière (https://blog.bornhauser-avocats.fr/index.php/2018/12/14/affaire-lupa-une-happy-end-a-lhorizon/) : au nom d’un contribuable différent (la société Fra SCI), l’affaire Lupa allait être examinée à nouveau par le Conseil d’Etat. Et l’affaire se présentait bien puisque le Rapporteur public avait conclu à la décharge tant sur le fondement de la loi (la jurisprudence Quemener et Barradé) que sur celui de la doctrine administrative.


Las, au dernier moment, l’affaire a échappé aux 3ème et 8ème chambres réunies pour aboutir en plénière fiscale. Ce n’est pas très étonnant car le Rapporteur public ne proposait pas moins au Conseil d’Etat que de revenir sur la solution adoptée 2 ans et demi plus tôt et qui avait déclenchée l’avalanche de critiques que l’on sait.


Et c’est heureux car par un raisonnement impeccable qui démontre que nos magistrats suprêmes avaient entendu et surtout compris les critiques formulées contre la décision Lupa, les quatre chambres fiscales réunies ont remis le 24 avril 2019 (n° 412503, qui sera publiée au Recueil Lebon) les pendules à l’heure : pour éviter une double imposition du même gain, les jurisprudences Quemener et Barradé exigent qu’en cas de dissolution de la société de personnes possédant un immeuble dont les titres ont été acquis pour une valeur proche de celle de l’immeuble social, la plus-value dégagée à cette occasion sur l’immeuble social puisse se compenser avec la moins-value réalisée à raison de l’annulation des parts sociales.


Le fait que la plus-value de cession des parts sociales n’ait pas été soumise à l’impôt en France en application des stipulations d’une convention fiscale attribuant le droit d’imposer à l’Etat du cédant, pour irritant que cela puisse apparaître aux yeux de certains, se saurait justifier une dérogation aux principes dégagées par les jurisprudence Quemener et Barradé qui créerait une double imposition économique au détriment de l’immense majorités des contribuables concernés (tous ceux qui ne pouvaient pas se prévaloir des stipulations d’une convention très particulière : la franco-luxembourgeoise dans sa version antérieure à 2009).


En résumé, il faut saluer que par cette belle décision, le Conseil d’Etat ait eu l’honnêteté de reconnaître aussi rapidement que dans l’affaire Lupa, il s’était tout simplement trompé. Et également remercier l’administration d’avoir adopté, en ne rapportant pas sa doctrine, une solution d’attente pragmatique qui a permis à de nombreuses cessions de sociétés de personnes à prépondérance immobilière de se réaliser dans l’intervalle.


Un bel exemple de coopération entre avocats, enseignants-chercheurs, magistrats et membres de la DLF que l’on souhaiterait voir plus souvent.