Résumé : La doctrine administrative taxe les profits réalisés par les particuliers sur les cryptomonnaies comme un BIC ou un BNC, donc au barème progressif de l’IR. Nous considérons que sauf exercice d’une véritable activité professionnelle du type « mineur », ces gains devraient relever, en application de l’article 150 UA du CGI, du taux proportionnel de 19 % (majoré des prélèvements sociaux) et bénéficier des abattements pour durée de détention. Un REP a été déposé devant le Conseil d’Etat pour faire annuler la doctrine administrative.
On sait que l’administration considère que les profits réalisés lors de la cession de cryptomonnaies relèvent soit des Bénéfices Non Commerciaux lorsque l’activité est exercée à titre occasionnel (BOI-BNC-CHAMP-10-10-20-40, n° 1080), soit des Bénéfices Industriels et Commerciaux lorsqu’ils sont réalisés à titre habituel (BOI-BIC-CHAMP-60-50, n° 730 et 740).
Cette position condamne les cryptomonnaies telles le Bitcoin comme classe d’actifs pour les personnes physiques, puisque dans les deux cas, le profit retiré de leur cession va se trouver soumis au barème progressif de l’impôt sur le revenu sans aucun abattement, alors que les plus-values de cession de titres bénéficient aujourd’hui de la flat tax à 30 % (prélèvements sociaux inclus).
Toutefois, il résulte de l’exemple même que la doctrine administrative donne pour illustrer son propos qu’elle confond allègrement les « mineurs », qui rendent effectivement des services à la plateforme de services adossée à la cryptomonnaie et qui sont rémunérés précisément par attribution d’unités de cette cryptomonnaie (ou « token »), avec les investisseurs qui achètent la cryptomonnaie lorsque celle-ci est cotée sur le marché secondaire (ce qui permet d’ailleurs aux « mineurs » de convertir leurs token en devises ayant cours légal).
Or, s’il est logique et cohérent de soumettre les « mineurs » à l’impôt dans la cellule des BNC ou des BIC selon qu’ils interviennent occasionnellement ou habituellement, l’application des mêmes règles aux investisseurs apparaît nettement moins évidente.
En effet, il existe dans le CGI un texte qui nous paraît bien mieux correspondre au gain réalisé par les investisseurs en cryptomonnaie : l’article 150 UA qui prévoit déjà l’application d’une régime d’imposition aux « plus-values réalisées lors de la cession à titre onéreux de biens meubles ou de droits relatifs à ces biens, par des personnes physiques ». Sachant que l’imposition s’établit alors au taux proportionnel de 36,2 % (prélèvements sociaux compris) et que l’assiette bénéficie d’un abattement pour durée de détention de 5 % par an à compter de la 3ème, on comprend que les détenteurs de cryptomonnaies aient tout intérêt à revendiquer le bénéfice de ce régime.
Dans l’intérêt de plusieurs de nos clients ayant acheté des bitcoins peu de temps après leur cotation et se trouvant donc à la tête d’un patrimoine de plusieurs centaines de milliers d’euros compte tenu de la flambée de cette cryptomonnaie, nous avons demandé au Conseil d’Etat, dans le cadre d’un Recours pour Excès de Pouvoir, de bien vouloir annuler la doctrine administrative suscitée.