Sociétés exonérées d’impôt et conventions fiscales : une clarification bienvenue du Conseil d’Etat
(CE 2 février 2022, n° 443018)
On sait que pour pouvoir bénéficier d’une convention fiscale préventive de double imposition, une société doit être assujettie à l’impôt à raison de son statut ou de son activité. En application de ce principe, le Conseil d’Etat a refusé à une société exonérée d’impôt sur les sociétés à raison de son statut de société financière le bénéfice de la Convention fiscale franco-allemande et donc l’obtention du taux de retenue à la source conventionnel (CE 9 novembre 2015, n° 370054).
La Tunisie offrait un régime incitatif aux entreprises qui fournissaient des prestations de services à des entreprises étrangères : elle leur permettait de déduire de leurs résultats imposables en Tunisie le bénéfice réalisé à l’étranger. Ce régime pouvait aboutir à une exonération totale si la société tunisienne n’exerçait son activité qu’à l’international. Il était toutefois limité dans le temps à 10 ans.
Dire qu’il a été utilisé avec parcimonie relèverait de la litote : de nombreuses sociétés informatiques françaises s’en sont en effet servi pour sous-traiter une partie de leurs prestations en utilisant de la main d’œuvre locale tout en réalisant une économie fiscale substantielle. Et il ne surprendra personne que l’administration fiscale française ait tenté de remettre en cause l’exonération de la retenue à la source de l’article 182 B du CGI sur les prestations facturées par une société tunisienne au motif que cette dernière ne pouvait pas demander le bénéfice de la convention fiscale franco-tunisienne faute d’avoir été imposée localement sur son bénéfice.
Or, quand on considère les critères retenus par le Conseil d’Etat en 2015, la position du fisc français ne manquait pas de logique : difficile de prétendre que la société tunisienne n’était pas exonérée d’impôt du fait de son activité puisque son activité exportatrice bénéficiait d’une exonération…
Le Conseil d’Etat a toutefois suivi la Cour Administrative de Paris en considérant que le critère de l’imposition à raison de l’activité visait toute l’activité susceptible d’être exercée par la société, de sorte que le bénéfice d’une exonération pour une partie de l’activité – l’exportation – n’était pas susceptible d’exclure la société tunisienne du bénéfice de la convention fiscale.
Ce régime de faveur a depuis disparu mais pour les sociétés qui en bénéficiaient il continue à s’appliquer jusqu’au terme des 10 années. Elles peuvent pousser un ouf de soulagement !