On se doutait bien que l’administration ne resterait pas inactive face à l’invalidation de sa doctrine excluant du régime « Dutreil » les locations de locaux équipés ou meublés (pour la location en meublé : https://blog.bornhauser-avocats.fr/2023/10/le-regime-dutreil-sapplique-aussi-a-la-location-meublee/ ; pour la location équipée : https://blog.bornhauser-avocats.fr/2023/06/le-regime-dutreil-sapplique-aux-locations-de-locaux-professonnels-equipees/). Et que les textes budgétaires de fin d’année allait lui en donner l’occasion.

C’est désormais chose faite : un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances exclut expressément du champ d’application du régime des articles 787 B et C du CGI les activités de location en meublé et équipée, qualifiées un peu abusivement de patrimoniales, ceci à compter du 17 octobre 2023. Les seuls qui auront pu bénéficier de la jurisprudence auront donc été soit les contribuables téméraires qui ont refusé d’appliquer une doctrine dont ils pensaient – à bon droit – qu’elle était illégale, soit les contribuables réactifs qui se sont engouffrés dans la brèche dès qu’elle est apparue.

Pour les autres, la porte est définitivement close même s’ils ont pris un engagement collectif de conservation antérieur à l’amendement, car seule une mutation à titre gratuit (donation ou succession) intervenue avant le 17 octobre 2023 pouvait bénéficier du régime « Dutreil ».

L’exposé des motifs de cet amendement nous renseigne également sur les intentions du Gouvernement. Manifestement, celui-ci compte reprendre certaines des propositions d’un rapport parlementaire qui trouve que décidément, le régime Dutreil est bien trop favorable à ses bénéficiaires. Seraient ainsi dans le collimateur la possibilité de bénéficier de l’abattement de 75 % sur les actifs non professionnels lorsque ces derniers sont prépondérants et la prise en compte comme prix de revient fiscal des titres transmis pour leur valeur avant abattement.

Autant dire que si ces mesures passent, c’est tout simplement la mort du pacte « Dutreil ». Rappelons au Gouvernement et législateur que la France a les droits de mutation à titre gratuit parmi les plus élevés du monde (après la Corée du Sud) et que l’abattement de 75 % prévu par les articles 787 B et C du CGI permet de les rendre supportables pour la frange la plus productive de notre population, à savoir les entrepreneurs. Si vous leur supprimez ce régime, vous risquez d’entraîner un nouvel exode fiscal dont notre pays se passerait volontiers dans le contexte actuel !

On peut toutefois espérer que ce n’est pas le but recherché et que le bon sens économique finira par l’emporter sur les passions égalitaristes.