(Cass. 1° Civ., 23 octobre 2024, n° 22-20.879)

On sait que conformément aux articles 605 et 606 du Code Civil, le nu-propriétaire ne doit supporter sur un immeuble démembré que les grosses réparations (celles portant sur le clos et le couvert), de sorte que c’est en principe à l’usufruitier de supporter tous les autres types de dépenses.

Pourtant, la lettre du texte de ces articles – rédigés au début du XIXème siècle – n’est pas si claire que ça : l’article 605 affirme le principe que « l’usufruitier n’est tenu qu’aux réparations d’entretien » et que « les grosses réparations demeurent à la charge du (nu-)propriétaire ». Quant à l’article 606, il définit les grosses réparations comme « celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières », ajoute « celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier » pour conclure que « toutes les autres réparations sont d’entretien ».

Certains contribuables se sont avisés qu’ainsi articulés, la combinaison de ces deux articles pouvait être interprétée comme mettant à la charge de l’usufruitier tous les travaux autres que les grosses réparations. Et notamment les travaux d’amélioration de l’immeuble.

Cette stratégie vient d’être soumise à la cour de cassation, qui n’a pas été de cet avis. Elle a en effet rejeté le pourvoi contre l’arrêt d’appel ayant jugé que la prise en charge par l’usufruitier des travaux d’aménagement d’une maison (électricité, plomberie, interphone, restauration de façade, éclairage, ravalement, rénovation), dont certains auraient d’ailleurs dû être à la charge du nu-propriétaire, constituait une libéralité rapportable, l’intention libérale étant caractérisée par le fait que le nu-propriétaire qui avait indirectement bénéficié des travaux était la fille de l’usufruitier et que ce dernier n’en avait tiré aucun bénéfice.

Au-delà de l’obligation au rapport qui s’impose au nu-propriétaire pointe surtout le risque fiscal. Comme souvent, c’est un litige entre héritier qui le révèle. Mais maintenant que le juge civil a pris position, il sera difficile pour les nus-propriétaires d’immeubles sur lesquels les parents usufruitiers réalisent des travaux importants et non nécessaires pour assurer le strict entretien de l’immeuble, sa mise en conformité à une obligation légale de rénovation ou respecter une contrainte de bail de prétendre que cette opération bien connue ne constitue pas une donation indirecte.

Tout au plus pouvons-nous leur recommander de bien s’entendre et de surtout ne pas se brouiller…