(Cons. Const. 9 juillet 2021, n° 2021-923 QPC)

On se souvient que la Cour de cassation avait saisi le Conseil Constitutionnel d’une Question Prioritaire de Constitutionnalité portant sur l’assiette des dons manuels, qui diffère de celle des donations puisqu’elle est égale à la plus élevée des deux valeurs suivantes : celle lors de la remise matérielle du bien ou celle lors de la révélation du don (https://blog.bornhauser-avocats.fr/2021/05/la-constitutionnalite-de-lassiette-de-la-taxation-des-dons-manuels-en-question/).


Nous trouvions les arguments avancés par l’auteur de la question plutôt pertinents, mais malheureusement pour lui, la Conseil Constitutionnel a jugé les règles applicables conformes à la Constitution. Et compte tenu de l’argumentation apparemment soutenue par le requérant, la solution paraît logique. En effet, si l’on se réfère à la décision rendue, ce dernier prétendait sanctionner une discrimination entre les différents récipiendaires d’un même don manuel, qui pouvaient se voir taxer sur une assiette différente en fonction de la date à laquelle ils auront présenté leur don à l’enregistrement. Le Conseil écarte le moyen en relevant qu’il n’y a pas de différence entre don déclaré et don révélé, les deux opérations étant en réalité identiques.


Nous craignons toutefois que l’auteur de la question soit passé complètement à côté du véritable problème, à savoir la différence d’assiette entre un don manuel déclaré ou révélé et une donation notariée. Dans le second cas, l’assiette est toujours la valeur du bien donné à la date de la donation, alors que dans le premier cela pourra être la valeur au jour de la révélation si elle est supérieure. C’est cette différence de traitement qui ne repose sur aucun critère rationnel et qui porte également atteinte aux capacités contributives du contribuable.


Ce problème avait portant été manifestement bien vu par la Cour de cassation, qui renvoyait l’ensemble de l’article au contrôle de constitutionnalité. Ce sont donc les écritures du Requérant devant le Conseil qui semblent avoir conduit ce dernier à cantonner la QPC au seul deuxième alinéa de l’article 757 du CGI, celui qui assimile les dons manuels révélés aux dons manuels déclarés.

Fort heureusement, le Conseil Constitutionnel n’a confirmé la constitutionnalité que de cette partie du texte. La porte reste donc ouverte pour une nouvelle QPC mieux articulée critiquant la constitutionnalité du 1er alinéa et en particulier de la phrase suivante : « Ces droits sont calculés sur la valeur du don manuel au jour de sa déclaration ou de son enregistrement, ou sur sa valeur au jour de la donation si celle-ci est supérieure ».
Car il est tout de même choquant qu’un don manuel puisse être imposé sur un montant différent – mais dans un sens toujours favorable aux intérêts du Trésor – que sa valeur au jour de sa réalisation entendue comme la tradition manuelle du bien.
Décidément, la QPC est un art difficile…